A l’entrée quelque peu encom- brée de l’exploitation de Thier- ry Burnereau, impossible de ne pas écraser la poignée de prunes qui roulent sur le sol. Pourtant, même s’il dispose de quelques pru- niers, cela ne fait pas partie des fruits qu’il produit. Lui se cantonne aux pommes, pêches, poires, figues, ce- rises, kiwis et raisin. Et c’est « pour la qualité de ses produits et pour ses jus de fruits », d’après l’exploitant, que le chef étoilé Thomas l’Hérisson se fournit chez lui.
Une qualité qui ne s’inscrit pas en agriculture bio. Et Thierry Burnereau lerevendique:« Jetravailleenagricul- ture raisonnée. » La différence ré- side, selon l’Institut national de re- cherche agronomique (Inra) dans l’interdiction, en agriculture biolo- gique, d’utiliser des produits chimi- quesdesynthèseetdesconditionsde transformation, entre autres. « Pour les pommes, on ne met pas d’insec- ticides mais on diffuse des phéro- mones pour que le papillon mâle ne s’accouple pas avec la femelle. Ainsi, celle-ci ne pond ni à l’extérieur, ni à l’intérieur du fruit. Donc, pas de vers dans la pomme ! », avance-t-il. Pour résumer, « c’est un compromis en- tre le moins d’intervention possible
et le moins de perte dans la récolte ». Mais cette non-certification en agri- culture biologique l’empêche de passer par les Amap (Association pour le maintien d’une agriculture paysanne). Pour autant, il a su les contourner et vendre au mieux ses récoltes. « Je passe par deux coopé- ratives de producteurs girondins et je suis aussi cogérant d’une bouti- que que nous avons ouverte il y a quatre ans, à Cenon », indique le producteur de 53 ans. Il poursuit : « Onnevendplusauxgrandesdistri- butions car leur demande baisse et ils n’ont pas une vraie volonté de dé- velopper les produits locaux. Moi, je vends à 80 % de ma production en circuits courts. »
Un magasin, des restaurants
L’autre moyen de se passer des gran- des enseignes reste la production des restaurants. En l’occurrence l’Hostellerie de plaisance du chef Ro- nan Kervarrec et l’Auberge Saint- Jean, menée par le chef Thomas l’Hé- risson, à Saint-Jean-de-Blaignac. Ce dernier lui prend, depuis six ans, « pas mal de poires, d’autres fruits et des jus de fruits, et ça, plusieurs fois par semaine ».
Pour cela, il doit avoir des fruits toute l’année. Dans un hangar, une grande chambre de conservation renferme des pommes qui seront gardées jusqu’à dix mois maxi- mum. « On a des modules qui per- mettent de contrôler le taux d’oxy- gène, de gaz carbonique et la teneur en sucre et en amidon dans le fruit pour stopper la fermentation et qu’il se conserve bien. On les fait hiber- ner, mais pas certains, comme les ce- rises. »Hormis les jus, le producteur
compose aussi des purées sans ajouts de sucre, ou de conservateurs, qu’il vend soit dans les coopératives, soit directement sur le lieu de son exploitation.
Si le producteur girondin est dans le métier depuis 1986, c’est aussi grâce à ses parents qui tenaient le domaine auparavant. Son père, Ro- ger, n’hésite pas à venir traîner dans le hangar où sont triés les fruits. « J’habite à côté, donc si Thierry ne travaille pas je viens lui taper sur les doigts », sourit-il d’un air espiègle. Un héritage qui remonte à l’arrière- grand-père de Thierry Burnereau, lui-même natif de Blasimon. Il ré- sume, paraphrasant ainsi Henri Sal- vador : « Le travail c’est la santé, rien faire c’est la conserver ! »